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Au fil des étoiles
11 mars 2016

Vers le ciel (extrait)

St Raphaël 070

J'ai obtenu l'accord de publier un extrait de ma nouvelle sur ce blog depuis quelques temps déjà... Mais j'hésitais sur la marche à suivre. Devais-je présenter l'univers quitte à gâcher la surprise ? Devais-je me perdre en explications ? Je n'en avais aucune idée. J'ai fini par faire le plus simple et vous laissez le début : le principe de l'uchronie est mis en place, mais l'intrigue principale n'est pas encore là et vous aurez tout le loisir de la découvrir par vous-mêmes. J'espère que l'idée vous plaira !

***

    ‒ Victor, tu ne peux pas faire ça, dit Juliette d’une voix ferme.
    ‒ Bien sûr que si ! répondit-il avec conviction. Il soutient le retour du pape à Rome ! Crois-tu qu’il s’arrêtera là ? Si nous ne faisons rien, si nous ne luttons pas, un nouvel empire verra le jour. Je ne l’accepterai pas, moi qui me suis battu pour la démocratie... Je m’exilerai s’il le faut, mais je ne cautionnerai pas une telle politique !
    ‒ Et crois-tu vraiment pouvoir t’y opposer seul ? répliqua la jeune femme avec un sourire dubitatif. Tu as beau être Victor Hugo, tu n’en restes pas moins un homme. Les gens soutiennent Louis Napoléon. Après tout, c’est un Bonaparte. Et tu parles d’exil ? Tu abandonnerais si facilement la lutte ? Reste. Tu as l’oreille de Louis Napoléon ; il t’écoutera. Empêche ce nouvel empire de voir le jour en te ralliant à lui.
    Victor poussa un soupir. Juliette avait de bons arguments. Mais cela signifiait se taire et ravaler sa fierté… Victor n’était pas comme cela.
    ‒ Je ne sais pas… hésita-t-il à haute voix.
    Juliette balaya son doute d’un geste de main agacé.
    ‒ Bien sûr, ce serait beaucoup moins grandiloquent que de partir si tu acceptais humblement ton rôle pour le bien commun, dit-elle. Ce ne serait pas aussi héroïque. Toi, Victor Hugo, seul contre tous, exilé mais défendant coûte que coûte les valeurs de la République... Où donc irais-tu avec ta fierté ?
    Victor haussa les épaules.
    ‒ En Angleterre, sans doute, dit-il. Ou en Belgique. Je n’ai pas réfléchi aux détails.
    ‒ Mais la République n’est pas encore morte ! répliqua la jeune femme avec feu. Pour un de ses plus fervents défenseurs, tu es bien prompt à l’enterrer !
    ‒ Et toi, tu es trop passionnée pour voir le danger ! se défendit Victor avec colère. Ne nie pas ce qui est en train de se passer ! Es-tu assez naïve pour croire que Louis Napoléon ne tentera pas un coup d’État ? Je ne peux pas accepter qu’il devienne empereur !
    ‒ Alors, détruis son projet de l’intérieur ! Plutôt que de fuir, bats-toi davantage ! insista Juliette. Tu as des arguments, de l’expérience, une réputation... Essaie de le convaincre ! Ce n’est pas parce que tu ne prends pas les armes ou que tu ne fais pas un acte romantique que tu n’auras pas changé le cours des choses !
    ‒ Et que se passera-t-il si j’ai tort ? Que se passera-t-il si Louis Napoléon crée un second Empire ? s’énerva pour de bon Victor.
    Juliette se calma soudain. Elle se passa une main fatiguée dans les cheveux. Les dernières semaines avaient été difficiles ; ils avaient à peine trouvé le temps de se voir. Et aujourd’hui, ils se disputaient...
    ‒ Il sera toujours temps de partir, non ? demanda-t-elle d’une petite voix. Victor... Nous sommes à Paris, nous vivons si près l’un de l’autre, et nous nous voyons à peine... Que se passera-t-il si tu devais t’exiler ?
    ‒ Il n’est pas dit que ma femme me suivrait, fit remarquer Victor avec un sourire.
    ‒ Et moi, je le ferais ? répondit Juliette. Je t’aime, et je serais prête à aller jusqu’au bout du monde pour toi, mais l’exil… Ce n’est pas une simple partie de plaisance ou un voyage en Suisse que tu me demandes.
    Victor sentit soudain l’angoisse l’envahir. Il n’avait pas pensé à ça.
    ‒ Tu ne serais pas prête à me suivre ? demanda-t-il.
    ‒ Bien sûr que si ! répliqua aussitôt Juliette. Mais pas aussi facilement. Pas si tu n’as pas exploré toutes les options possibles.
    Victor resta un instant silencieux. Il mesurait les implications de ce que Juliette lui demandait. Elle était prête à s’exiler pour lui. Était-il prêt à attendre encore un peu, au prix de ses idéaux ?
    ‒ Parle-lui, Victor, insista Juliette en lui prenant doucement la main. Parle à Louis-Napoléon. Il n’est peut-être pas aussi dur à convaincre que tu le crois. Insiste, argumente. Tu es capable de le faire. Après tout, tu es Victor Hugo.
    Victor sourit.
    ‒ Bien, accepta-t-il enfin. Je lui parlerai.

"Vers le ciel", Antho-noire steampunk, les Editions de la Cabane à Mots

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